Les refuges canadiens débordent – Trois femmes sur quatre se butent à des portes closes

les refuges canadiens debordent trois femmes sur quatre se butent a des portes closes

Près de 75 % des femmes et enfants qui ont tenté de trouver refuge dans une maison d’hébergement pour victimes de violence conjugale au Canada se sont heurtés à des portes closes l’an dernier, faute de places disponibles.

 C’est du moins le portrait tracé par le rapport annuel 2016 du Réseau canadien des maisons d’hébergement Les Maisons s’expriment, qui a capturé, à l’aide d’un sondage, la réalité vécue lors d’une journée par ces ressources destinées à porter secours aux femmes et enfants violentés.

 Le rapport fait état de la situation vécue dans les 234 organisations membres du réseau canadien qui a accueilli l’an dernier, lors d’une journée type, quelque 1760 femmes et 1915 enfants fuyant la violence familiale. Toutefois, le même jour, sur les 416 femmes vivant une situation de crise qui réclamaient de l’aide, seulement 111 ont pu être hébergées, alors que 305 autres étaient refusées (73 %).

 Au moment du sondage, 38 % des responsables de maisons pour femmes interrogés disaient n’avoir plus aucun lit disponible, ce qui témoigne de l’engorgement auquel font face ces ressources très sollicitées à l’échelle du pays.

 « Nous fonctionnons à 140-155 % depuis les sept derniers mois. Notre personnel est fatigué », commente une travailleuse en maison d’hébergement, citée dans le rapport.

 La plupart du temps, les femmes refusées par manque de place sont redirigées vers d’autres maisons pour femmes violentées (49 %), vers des hébergements non spécialisés en violence conjugale (35 %), vers des lignes d’aide téléphonique (31 %) ou temporairement vers des hôtels (8 %).

 Dix mille femmes refusées au Québec

 Le dernier rapport du Réseau canadien des maisons d’hébergement ne contient pas de chiffres propres à la situation vécue au Québec, mais les plus récentes données produites par la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes (FMHF), qui regroupe 34 des 109 refuges du Québec, démontrent qu’au moins 8000 femmes victimes de violence se sont vu refuser l’accès à des refuges en 2014-2015.

 « Quand elles se retrouvent en situation de crise, les femmes n’ont pas un accès aussi direct à un endroit sécuritaire. En plus, les compressions liées aux mesures d’austérité ont eu des impacts sur l’accès à toutes sortes d’autres services auxquels cette clientèle peut avoir recours, notamment des logements sociaux, des services en santé mentale ou en toxicomanie », explique Manon Monastesse, directrice générale de cette fédération.

 En 2014-2015, quelque 2759 femmes et 1572 enfants ont réussi à être hébergés dans les 34 maisons du réseau, démontrent les chiffres de FMHF. Ce qui signifie que la proportion de refus (évaluée à 10 000) essuyés par les femmes fuyant la violence conjugale au Québec est de la même ampleur que celle observée dans l’ensemble du Canada.

 Le manque de ressources s’avère particulièrement criant pour les femmes autochtones, note Mme Monastesse. Une seule maison d’hébergement, située à Chibougamau, dessert tout le nord du Québec, où la violence conjugale et familiale est une problématique qui touche de plein fouet les communautés autochtones. La même situation prévaut aussi dans le reste du Canada, notamment dans les Territoires du Nord-Ouest, une région de 1,4 million de kilomètres carrés desservie par seulement quatre maisons pour femmes victimes de violence.

Article paru dans le Devoir 

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crédits photo: IStock